Travail dissimulé

Définition 

Le travail dissimulé est un délit qui consiste soit à dissimuler totalement ou partiellement une activité, en ne procédant pas, par exemple, à la déclaration d’une partie du chiffre d’affaires ou des revenus, soit à dissimuler totalement ou partiellement l’emploi d’un salarié (absence de déclaration préalable à l’embauche, absence de bulletin de paie ou mention sur le bulletin de paie d’un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement effectué, sauf si cette mention résulte de l’application d’une convention ou d’un accord d’annualisation du temps de travail).

Sont exclus du travail dissimulé les travaux d’urgence dont l’exécution immédiate est nécessaire pour prévenir des accidents imminents ou organiser des mesures de sauvetage, ainsi que les activités bénévoles et l’entraide.

Les peines encourues en cas de travail dissimulé sont de 3 ans d’emprisonnement et 45.000 € d’amende, outre des peines complémentaires, comme l’interdiction d’exercer son activité professionnelle pendant 5 ans maximum (articles L. 8224-1 et L. 8224-2 du code du travail).

Dissimulation d’activité

Selon l’article L. 8221-3 du code du travail, est réputé travail dissimulé par dissimulation d'activité, l'exercice à but lucratif d'une activité de production, de transformation, de réparation ou de prestation de services ou l'accomplissement d'actes de commerce par toute personne qui, se soustrayant intentionnellement à ses obligations :

- soit n'a pas demandé son immatriculation au registre national des entreprises en tant qu'entreprise du secteur des métiers et de l'artisanat ou au registre du commerce et des sociétés, lorsque celle-ci est obligatoire, ou a poursuivi son activité après refus d'immatriculation, ou postérieurement à une radiation ;

- soit n'a pas procédé aux déclarations qui doivent être faites aux organismes de protection sociale ou à l'administration fiscale en vertu des dispositions légales en vigueur. Cette situation peut notamment résulter de la non-déclaration d'une partie de son chiffre d'affaires ou de ses revenus ou de la continuation d'activité après avoir été radié par les organismes de protection sociale en application de l'article L. 613-4 du code de la sécurité sociale ;

- soit s'est prévalue des dispositions applicables au détachement de salariés lorsque l'employeur de ces derniers exerce dans l'Etat sur le territoire duquel il est établi des activités relevant uniquement de la gestion interne ou administrative, ou lorsque son activité est réalisée sur le territoire national de façon habituelle, stable et continue.

L’article L. 8221-4 du code du travail précise que les activités mentionnées à l'article L. 8221-3 sont présumées, sauf preuve contraire, accomplies à titre lucratif :

- soit lorsque leur réalisation a lieu avec recours à la publicité sous une forme quelconque en vue de la recherche de la clientèle ;

- soit lorsque leur fréquence ou leur importance est établie ;

- soit lorsque la facturation est absente ou frauduleuse

- soit lorsque, pour des activités artisanales, elles sont réalisées avec un matériel ou un outillage présentant par sa nature ou son importance un caractère professionnel.

La seule constatation de la violation en connaissance de cause d’une prescription légale ou réglementaire implique de la part de son auteur l’intention coupable exigée par l’article 121-3 du code pénal, et donc l’intention de dissimuler une activité (Cass. Crim., 27 février 2018, n° 17-80.856).

Dissimulation d’emploi salarié

Selon l’article L. 8221-5 du code du travail, est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié le fait pour l’employeur de se soustraire intentionnellement :

- à la déclaration préalable à l’embauche ;

- à la délivrance d’un bulletin de paie ou de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail ;

- aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.

Comme pour la dissimulation d’activité, la seule constatation de la violation en connaissance de cause d’une prescription légale ou réglementaire suffit à caractériser l’intention de dissimuler un emploi (Cass. Crim, 27 septembre 2005, n° 04-85.558).

Le délit est caractérisé en cas d’emploi irrégulier occasionnel, le caractère habituel du recours à ces pratiques n’étant pas une condition de l’infraction (Cass. Crim., 30 mai 1995, n° 94-82.372).

Le caractère intentionnel du travail dissimulé est nécessairement caractérisé en cas de mention pendant plusieurs années, sur les bulletins de paie, d’un nombre d’heures très inférieur à celui effectué chaque mois (Cass. Soc., 20 juin 2013, n° 10-20.507).  

Indemnité forfaitaire

En cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel l’employeur a eu recours en violation de l’interdiction de travail dissimulé a droit à une indemnité forfaitaire égale à 6 mois de salaire, en application de l’article L. 8223-1 du code du travail

Au regard de la nature de sanction civile de cette indemnité, les dispositions de l’article L. 8223-1 du code du travail ne font pas obstacle au cumul de l'indemnité forfaitaire qu'elles prévoient avec les indemnités de toute nature auxquelles le salarié a droit en cas de rupture de la relation de travail (Cass. Soc., 6 février 2013, n° 11-23.738).

L’indemnité forfaitaire se cumule donc avec les indemnités légales ou conventionnelles de licenciement ou de mise à la retraite, les dommages-intérêts en cas de licenciement abusif ou irrégulier (Cass. Soc., 12 janvier 2006, n° 03-46.800 et n° 04-43.105) ou encore l’indemnité de requalification d’un CDD en CDI (Cass. Soc., 12 janvier 2006, n° 03-44.776).

Le paiement de l'indemnité forfaitaire n'est pas subordonné à l'existence d'une décision pénale préalable déclarant l'employeur coupable du délit de travail dissimulé (Cass. Soc., 15 octobre 2002, n° 00-45.082).

Sanctions pénales

L’article L. 8224-1 du code du travail prévoit que le travail dissimulé est puni d’un emprisonnement de 3 ans et d’une amende de 45.000 € (225.000 € pour les personnes morales).

Des peines complémentaires sont par ailleurs encourues par les personnes physiques et les personnes morales : interdiction d’exercer une activité, exclusion des marchés publics, confiscation de biens, affichage ou diffusion de la décision, interdiction des droits civiques.

Jérémy DUCLOS
Avocat au barreau de Versailles
Spécialiste en droit du travail

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