RÉSILIATION JUDICIAIRE DU CONTRAT DE TRAVAIL
Définition
La résiliation judiciaire du contrat du travail permet de rompre le contrat à l'initiative du salarié, par la saisine du conseil de prud’hommes, lorsque l'employeur commet des manquements graves à ses obligations contractuelles.
Comme en matière de prise d’acte, ces manquements graves peuvent être de différentes natures : non-paiement du salaire, harcèlement, manquement à l’obligation de santé et de sécurité, non-respect du salaire minimum conventionnel ou du repos hebdomadaire, modification du contrat sans l’accord du salarié...
Tout salarié en CDI peut demander la résiliation judiciaire du contrat de travail.
Le salarié en CDD peut demander la résiliation judiciaire du contrat de travail uniquement en cas de faute grave de l'employeur ou de force majeure.
Modalités
Pour demander la résiliation judiciaire du contrat de travail, le salarié doit saisir le conseil de prud'hommes.
Pendant toute la procédure judiciaire, le salarié continue de travailler dans les conditions habituelles.
Toutefois, le contrat peut être rompu (démission, licenciement, rupture conventionnelle, prise d'acte) pendant la procédure prud'homale.
Si le salarié est licencié avant la décision du conseil de prud’hommes, alors les juges doivent, en premier lieu, rechercher si la demande de résiliation était justifiée (Cass. Soc., 10 mai 2012, n° 10-21.690).
C’est seulement dans le cas où la demande de résiliation n’est pas justifiée que les juges se prononcent sur le licenciement notifié par l’employeur (Cass. Soc., 07 février 2007, n° 06-40.250).
Le salarié peut prendre acte de la rupture de son contrat, en cours d’instance, pour les mêmes faits ou d’autres faits. Le juge doit alors examiner les manquements de l'employeur invoqués par le salarié tant à l'appui de la demande de résiliation judiciaire devenue sans objet qu'à l'appui de la prise d'acte (Cass. Soc., 31 octobre 2006, n° 04-46.280).
Si, au moment où le juge statue, le contrat de travail a pris fin par une rupture conventionnelle, alors la demande de résiliation devient sans objet (Cass. Soc., 10 avril 2013, n° 11-15.651).
Conséquences
Si les manquements de l’employeur invoqués par le salarié sont suffisamment graves et établis pour empêcher la poursuite du contrat de travail, alors le juge prononce la rupture de celui-ci, au jour de la décision, sauf si le contrat a déjà été rompu au cours de la procédure judiciaire et que le salarié n’est plus au service de son employeur (Cass. Soc., 21 septembre 2016, n° 14-30.056).
Les juges du fond sont tenus d'examiner l'ensemble des griefs invoqués à l'appui de la demande de résiliation judiciaire (Cass. Soc., 15 mars 2019, n° 17-27.380), quelle que soit leur ancienneté (Cass. Soc., 30 juin 2021, n° 19-18.533).
Cette rupture produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse (Cass. Soc., 20 janvier 1998, n° 95-43.350).
Elle ouvre droit à l’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse, mais pas à celle due pour non-respect de la procédure de licenciement (Cass. Soc., 20 octobre 2010, n° 08-70.433).
Elle produit les effets d’un licenciement nul en cas de harcèlement, de discrimination ou encore si le salarié est protégé.
Le contrat de travail est considéré comme rompu à la date de la décision de justice la prononçant, dès lors qu'il n'a pas été rompu avant cette date (Cass. Soc., 14 octobre 2009, n° 07-45.257 ; Cass. Soc., 3 juillet 2013, n° 12-10.047) et que le salarié est toujours au service de son employeur (Cass. Soc., 22 juin 2022, n° 20-21.411).
À l’inverse, si les manquements de l’employeur ne sont pas établis ou insuffisamment graves, alors le juge déboute le salarié de sa demande (Cass. Soc., 04 septembre 2019, n° 18-19.739).
Dans ce cas, la relation contractuelle se poursuit (Cass. Soc., 26 septembre 2007, n° 06-42.551).
L’employeur ne peut pas tirer prétexte de l’action en justice introduite par le salarié pour le licencier, sous peine de nullité.
Jérémy DUCLOS
Avocat au barreau de Versailles
Spécialiste en droit du travail
https://www.duclos-avocat.com/