L’irrégularité du licenciement fondé sur une vidéosurveillance illicite

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La vidéosurveillance du salarié est une prérogative de l’employeur dans le cadre de son pouvoir de direction.

L’employeur peut surveiller et contrôler ses salariés sur le lieu et pendant le temps de travail, et sanctionner les comportements fautifs.

L’employeur peut-il prononcer un licenciement sur le fondement d’une vidéosurveillance dont l’existence n’a pas été préalablement portée à la connaissance du salarié ?

Dans un arrêt rendu le 20 septembre 2018 (n° 16-26.482), la chambre sociale de la Cour de cassation a rejeté le bien fondé du licenciement fondé sur l’exploitation des images de vidéosurveillance en raison de l’absence d’information du salarié de l’existence du système de surveillance.

Les faits sont simples : un salarié a été surpris en train de détourner de l’argent qui devait rester dans la caisse de l’établissement. Les caméras de vidéosurveillance ont confirmé la réalité des faits. L’employeur a déposé plainte pour vols et a procédé au licenciement du salarié pour faute grave. Au cours de son audition dans les services de la gendarmerie, le salarié a reconnu les faits. Il a fait l’objet d’un rappel à la loi.

La vidéosurveillance du salarié a été considérée comme étant illicite dans la mesure où elle n’a pas été portée à la connaissance du salarié. Ce principe n’est pas nouveau et a déjà été jugé par le passé.

Par exemple, dans un arrêt du 7 juin 2006 (n° 04-43.86), la chambre sociale de la Cour de cassation a jugé que constituent un moyen de preuve illicite les enregistrements du salarié au moyen du système de vidéosurveillance de la clientèle mis en place par l’employeur et également utilisé par celui-ci pour contrôler ses salariés sans information et consultation préalables du comité d’entreprise.

Dans le même sens, l’employeur ne peut être autorisé à utiliser comme mode de preuve les enregistrements d'un système de vidéosurveillance installé sur le site d'une société cliente permettant le contrôle de leur activité dont les intéressés n'ont pas été préalablement informés de l'existence (Cass. Soc., 10 janvier 2012, n° 10-23.482).

En droit, l’employeur qui souhaite mettre en place un système de vidéosurveillance sur le lieu de travail doit consulter le comité économique et social (article L. 2312-38 C. trav) ou le comité d’entreprise (ancien article L. 2323-47 C. trav) et informer les salariés. 

De manière plus générale, en application de l’article L. 1121-1 du code du travail, les moyens de contrôle utilisés par l’employeur ne doivent pas apporter aux droits et libertés des salariés des restrictions disproportionnées et non justifiées par la nature de la tâche à accomplir.

En l’occurrence, l’employeur a fait valoir que si les preuves obtenues par un système de vidéosurveillance sont illicites lorsqu’il n’est pas démontré que le salarié a eu connaissance de la mise en place d’un tel système, la reconnaissance des faits par le salarié au cours de son audition constitue un aveu extra-judiciaire propre à établir la réalité de la faute grave, indépendamment des preuves obtenues par les caméras de vidéosurveillance.
La Cour de cassation ne retient pas cette analyse au motif que l'employeur avait déposé plainte pour des faits de vols en se fondant sur les images de la vidéosurveillance et que l’audition du salarié par les services de gendarmerie était consécutive à l’exploitation des images de vidéosurveillance illicite en raison de l’absence d’information du salarié de l’existence du système de surveillance.

Il faut retenir que le juge civil dispose d’une appréciation souveraine des éléments de preuve qui sont produits, de sorte que même si, sur le plan pénal, un rappel à la loi a été prononcé à l’encontre du salarié qui a reconnu au cours de son audition les faits pour lesquels il a été licencié, il reste que son licenciement repose sur un mode de preuve illicite, insusceptible en l’état pour reconnaître la culpabilité du salarié sur le plan civil.  

Jérémy DUCLOS
Avocat 

Spécialiste en droit du travail

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